
La Fashion Week est une institution dans les plus grandes capitales du monde : Milan, New York, Paris, Tokyo, et d’autant plus à Londres, où le style est perçu comme un reflet de la personnalité de l’individu. La semaine la plus attendue des fashionistas du Royaume-Uni se déroule du 14 au 18 février, et met à l’honneur des créateurs des quatre coins du monde. Le Centre Culturel Coréen de Londres a donc saisi cette occasion pour participer une fois encore à l’International Fashion Showcase à travers l’exposition K-Fashion Odyssey, qui présente des pièces phare de cinq jeunes créatrices coréennes : Chloe Kim (Kim Heejin), Jung ‘Gigi’ Jeehyun, Seo Hyein, Park Narae et Rejina Pyo. Les pièces varient des tenues complètes dans des noirs, rouges et blancs francs de Seo Hyein à la collection de Park Narae, dédiée à la réalité du travail des mineurs dans les sweatshops, encore fréquents dans l’industrie du prêt-à-porter.
Le panel de couleurs, majoritairement unies et tranchées s’étend du jaune vif chez Gigi Jung Jeehyun à des tons pastel rappelant les contes de fée, à la base de la recherche artistique de Chloe Kim. Rejina Pyo, quant à elle, apporte une touche structurelle presque entièrement centrée sur des angles rarement utilisés dans la haute couture : arrondis et pointes se retrouvent dans la même jupe, tandis que les hauts tubulaires brillants mettent en valeur le buste du modèle. A y regarder de près, toutes les pièces reposent sur des matières étonnantes, semblables à du carton épais et du bois aggloméré, démontrant que la mode ne s’arrête pas au coton et à la soie, matières pourtant très prisées en Occident.
L’amour des coréens pour le prêt-à-porter a fait la notoriété internationale des quartiers de Myeongdong, Dongdaemun ou encore les alentours de l’université Ehwa (이화여자대학교) à Séoul, ainsi que l’ensemble des shopping centers du métro coréen, que l »on trouve aussi bien dans la capitale qu’à Pusan ou même Jeju. Pourtant, les designers participant à K-Fashion Odyssey ont toutes pour point commun d’avoir étudié dans des écoles réputées du Royaume-Uni telles que St Martins, référence mondiale du secteur, ou le London College of Fashion. Si Gigi Jung Jehyun se spécialise dans les accessoires avec une sélection de chapeaux tous plus saugrenus les uns que les autres, les autres installations offrent des tenus complètes souvent plus accessibles, à l’exception de celle de Park Narae.
Park Narae a été reconnue par L’Oréal dans le cadre de son Professionnel Young Design Talent Award, prix décerné chaque année à un jeune créateur présentant une collection hors normes à St Martins. Son travail se concentre sur le travail des mineurs et leur capacité à garder le sourire en toute circonstance. Elle considère que cela reflète une valeur traditionnellement coréenne, la « joie de vivre » (heung, 흥), et son universalité. A travers des vêtements et accessoires réalisés à partir de bâches et de bouteilles en plastique, elle démontre la débrouillardise d’adulescents vivant en marge du monde. Il s’agit sans conteste de la collection la plus philosophique de la série, tandis que celles de online casino Rejina Pyo et Seo Hyein sont très fortement ancrées dans la réalité de la mode. Elles témoignent toutes deux d’une volonté de rendre le milieu accessible au grand public en créant des tenues proches du prêt-à-porter tout en conservant une esthétique toute particulière, ce qui a permis à Seo Hyein de remporter le prix du meilleur designer dans le cadre des British Council and British Fashion Council »s International Fashion Showcase Emerging Talent Award.
La dernière installation de l’exposition met en scène un paysage féérique et des robes en tulle aux replis multiples dans un souhait de ne faire qu’un avec la nature, un effet garanti par des tons pastel dans des nuances de rose, ivoire et gris perle. Le travail de Chloe Kim est surréaliste et rappelle les personnages de contes, où les plantes s’allient aux protagonistes pour créer un univers rêvé. L’utilisation de boules de coton duveteux au cœur du tableau accentue encore cette notion d’irréel, et rappelle les peintures dites Soo-mook-dam-ch’ae-hwa (수묵담채화), dessins traditionnels mettant en scène des paysages ou des plantes. A la différence de ces estampes utilisant presque exclusivement du noir et blanc, Chloe Kim accorde une place importante aux couleurs, qui lui permettent de joindre son inspiration coréenne avec les tenues occidentales que l »on retrouve dans les illustrations de contes de fée.
L’ensemble des pièces de l’exposition présentent néanmoins un point commun à travers une attention considérable aux courbes et angles. Précis et immuables chez Rejina Pyo, enfantins chez Gigi Jung Jeehyun et flous chez Chloe Kim, ils donnent pourtant leur esthétique à chacun des vêtements et accessoires. Cela reflète la tendance actuelle parmi les designers coréens de donner une place grandissante à la forme, au détriment parfois de la praticité. Seo Hyein est sûrement celle qui parvient le mieux à tirer son épingle du jeu en dessinant des pièces que l »on pourrait trouver dans les rayons de grands magasins tout en conservant leur esthétique unique. La créatrice admet que cette spécificité découle de sa volonté de développer des vêtements qui peuvent plaire à la fois au plus grand nombre et à un public avisé. Il va sans dire que les créatrices présentées dans le cadre de K-Fashion Odyssey sont encore aux débuts de leur carrière, et il y a fort à parier que leurs noms deviendront bientôt synonymes de la nouvelle création coréenne, qui a de beaux jours devant elle.
L »exposition se tient jusqu »au 2 mars au Centre Culturel Coréen du Royaume-Uni à Londres.
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